vendredi 12 décembre 2014

ÉRIC BOUTET, MON FRÈRE D’ARMES


Lorsqu’Éric m’a demandé d’écrire un court texte à son sujet pour la biographie rédigée par le Regroupement des Aveugles et Amblyopes du Québec (RAAQ), j’ai tout de suite accepté. Ça fait assez longtemps que l’on se connait, me suis-je dit, que ça ne devrait pas être trop difficile de pondre quelque chose.

Une fois la décision prise, il me fallait trouver un angle. J’ai rapidement laissé tomber le factuel pour y aller de façon plus personnelle. À mon avis, le lieu, l’époque, la façon dont nous nous sommes rencontrés importent peu. C’est la rencontre elle-même qui est importante.

Éric est plus qu’un ami, c’est un frère. Un frère d’armes comme on aime bien se le répéter. Je profite de ce petit clin d’œil à la chanson de Dire Straits - qu’il affectionne particulièrement- pour glisser subtilement qu’Éric est un mélomane averti et un musicien à ses heures. Et c’est un beau prétexte pour introduire le texte qui va suivre.

En effet, c’est peut-être un cliché, mais personne ne pourra contester que la vie en société est un combat de tous les jours, et ce, pour tout le monde. Alors si, en plus, la fortune vous a joué un mauvais tour, ça ajoute des écueils supplémentaires à la bataille.

C’est justement ça qui est fascinant avec mon pote. On oublie qu’il a un handicap visuel. Rien ne l’arrête. Emmenez-en des études universitaires, du vélo, de la pêche, des voyages d’aventure, des spectacles, de l’équitation, de la course à pied, du hockey, des transports en commun, des rénovations, de la cuisson sur le BBQ et j’en passe. En fait, je pourrais continuer encore longtemps, mais vous avez compris. Éric aime la vie. Il a de la «drive» et sait ce qu’il veut.

Doté d’une mémoire phénoménale, d’un sens de l’humour remarquable -on a besoin d’être en forme ou d’avoir les qualités d’un huissier pour saisir tous ses jeux de mots-, d’une intelligence vive et d’une écoute active et empathique, on est choyé de pouvoir compter sur son amitié.   

Éric sait parfaitement conjuguer la tête et le cœur. C’est un rationnel créatif si je peux dire. Il sait habilement alimenter les feux qui l’animent. Il peut d’un côté réfléchir jusqu’à plus soif pour trouver des solutions concrètes à des problèmes complexes, et de l’autre, laisser toute la place à son imagination débordante et à ses talents artistiques.

Enfin, je dirais que sa capacité à rebondir sur ses pattes lorsque des coups durs arrivent, pourrait nous faire croire que c’est lui qui a inventé le concept de résilience.        

Il y aurait tant à dire, mais comme l’espace est restreint, je vais m’arrêter ici.      

J’ajouterais simplement ceci à ceux et celles qui seraient tentés de le prendre pour un saint après la lecture de ce texte. Je vous le confirme, Éric a aussi ses défauts. Oui, oui ! Il est comme vous et moi, il est humain. Il est un humain à part entière qui incarne parfaitement les paroles de Saint-Exupéry «on ne voit bien qu’avec le cœur».



Jean-Luc Jolivet   

samedi 6 décembre 2014

DU CŒUR AU VENTRE

Me revient par les temps qui courent, parmi les belles expressions imagées et colorées entendues durant ma turbulente et belle jeunesse, celle-ci: «j’te dis qu’ils ont du cœur au ventre eux autres !».

Ce matin, j’ai le goût de faire écho aux paroles de cet homme qui a si fortement et si durablement marqué l’imaginaire de notre jeune nation par ses paroles et ses actions.

Je lui répondrais, oui, nous sommes un grand peuple.

Faudrait seulement se le répéter plus souvent. Faudrait se souvenir de tout le chemin parcouru depuis l’arrivée de ceux et celles qui nous ont précédés pour s’en convaincre. 

Faudrait se le dire, se le redire, oui, nous sommes des battants.

Pis là, j’veux pas faire de prêchi-prêcha ou de la psychologie à la p’tite semaine, mais merde, faut se regarder aller et reconnaitre qu’on a de la force de caractère et de l’allant comme dirait l’autre.

Malgré nos déchirements internes, nos guerres fratricides, nos coups de gueule, nos sautes d’humeur ou ces vents de face, on sait se retrousser les manches et se repencher cent fois sur le métier. Et ça, ce n’est pas rien.

J’en veux pour preuve toutes ces personnes qui, après un coup dur professionnel, ramassent leur courage et rapatrient toutes les forces disponibles pour se mettre à la recherche d’un emploi stimulant et satisfaisant.

Je pense à tous ces gens qui donnent de leur temps bénévolement pour relever les autres qui trébuchent et qui en arrachent. Et qui font s’éloigner la solitude.

Je prends en exemple tous ces parents qui, malgré les vicissitudes du quotidien, les difficultés de l’enfance, les handicaps, accompagnent leurs enfants à l’aréna, à la danse, à la natation. Ces mères et ces pères qui guident et prennent soin des leurs et qui travaillent d’arrache-pied pour leur offrir de bonnes conditions afin que ces derniers puissent s’épanouir sainement.

Je regarde la persévérance des nouveaux arrivants qui doivent tout reconstruire et qui se cherchent une place et un peu de chaleur au cœur de cet hiver parfois rude et glacial.

De peur d’en oublier, je vais m’arrêter ici.

J’ajouterai simplement ceci. Plus j’y pense et plus j’en suis convaincu. Malgré les temps durs, malgré cette étrange impression que l’argent va nous bouffer tout rond, nous n’avons pas dit notre dernier mot, nous ne baisserons pas les bras.

Nous sommes des résilients et nous avons trop de cœur au ventre pour accepter ça !

Jean-Luc Jolivet