samedi 31 janvier 2015


 UNE LUMIÈRE S’EST RALLUMÉE AU RAYON DES ÉCLOPÉS



Du fin fond de son indigence, elle a réussi à s’extirper.

Dans un ultime sursaut de vie, elle a trouvé le courage de sortir de son marasme et d’aller marcher pour s’aérer l’esprit et remettre de l’ordre dans ses idées. C’est alors qu’elle tomba sur une belle grosse flaque de soleil qui luisait là, juste pour elle, sur le trottoir. Comme si l’espoir lui disait «tu n’es pas seule, viens te réchauffer».

Elle s’est virtuellement enroulée dedans comme s’il s’agissait d’une énorme couverture chaude et réconfortante brodée par sa grand-mère. Elle s’y est emmitouflée en pensant à la douce sécurité des bras de son père qui, en des temps bénis et plus heureux, savaient la rassurer.

Pour refaire ses forces, elle a bu tous les rayons lumineux à sa disposition en prenant bien soin de «bénir la rue» pour cette oasis inespérée dans ce drôle de voyage. 

Ce moment de grâce lui a permis de retrouver sa petite musique intérieure et l’a aidée à repousser la puissance du vide qui l’avait agrippée depuis déjà trop longtemps et qui ne voulait plus la lâcher.

Une lumière s’est rallumée au rayon des éclopés. Une âme en déficit d’amour a été plus forte que la mort. Elle sait maintenant qu’elle aura le temps de s’accomplir et d’aller au bout de ses talents.

Cette belle jeune femme blessée, qui s’était échouée sur les rives de cette ville froide et impersonnelle, vient de remporter une victoire qui ne fera peut-être pas les nouvelles, mais qui vaut tous les doctorats honoris causa qu’une université renommée peut décerner.   

Comme quoi, la ligne entre le néant et une vie bien remplie est plutôt mince.



Jean-Luc Jolivet

dimanche 4 janvier 2015

L’ATTERRISSAGE

Ça y est.

Demain, ou dans quelques jours, nous devrons tous reprendre le collier. Nous devrons tous recommencer à rouler notre rocher de Sisyphe dans les sillons du quotidien et des horaires fixes. Pour le meilleur ou pour le pire. Oui, parce que, garder le rythme du temps des fêtes à l’année longue, pas sûr qu’il y aurait beaucoup de monde qui pourrait «toffer la run».

Et, je suis de ceux qui croient qu’il y a beaucoup de satisfaction et de plaisir à tirer d’un travail valorisant et enrichissant. Ai pas dit payant, mais bien enrichissant. En tout cas, en ce qui me concerne. Les deux ne sont évidemment pas incompatibles.

Peu importe, encore cette année, c’est la boîte à souvenirs remplie à ras bord et le corps ragaillardi de ces précieux moments que je sors bientôt de ce congé.  

Ce qu’il y a de bien là-dedans, c’est d’avoir la certitude que ce que j’ai emmagasiné en chaleur humaine et en générosité durant ces semaines, me serviront à traverser l’hiver et à me projeter dans l’avenir. Je sais que je suis privilégié et je suis reconnaissant.  

Dans mon cas, l’atterrissage, sur la piste de la vie courante, se fait graduellement et tout en douceur.

J’espère avoir assez de courage en 2015 pour sortir davantage de mon confort pépère et poser des gestes qui peuvent, aussi minimes soient-ils, améliorer un peu le sort des gens qui n’ont pas la même chance.



Jean-Luc Jolivet