mercredi 16 octobre 2013

LE HOCKEY

(À tous les kids qui nourrissent une passion, continuez batêche, lâchez pas !)

Pendant plus d’une décennie, le hockey a été toute ma vie. J’en mangeais comme on dit. Je jouais au hockey sur table, dans le sous-sol, dans les gymnases, dans la rue, à la patinoire extérieure, à l’aréna et….dans mes rêves. L’expression « y est né avec des patins din pieds » me faisait comme un gant.

Selon mes souvenirs, les premiers papillons se sont manifestés à l’aréna de Grand-Mère lors d’un match de mon frère aîné. Je devais avoir environ 6 ans. J’étais accoté sur le bord de la bande, juste à côté du banc des joueurs, et je fixais l’équipement du gardien. Le masque, les jambières, le biscuit et la mite - comme on les appelait - retenaient toute mon attention. Comment faire autrement ? Le gars avait l’allure d’un vrai guerrier ! Ce sont les cris de la foule, alors que l’équipe de mon frère venait de marquer un but, qui m’ont sorti de mes rêveries. Maudit que j’aurais tout donné pour être sur la glace à ce moment précis. C’était décidé, moi aussi je pratiquerais ce sport et probablement comme gardien de but !

Laissez-moi vous dire qu’en revenant à la maison, je ne tenais plus en place ! Je talonnais sans cesse mes parents. « Papa, maman, moi aussi je veux jouer au hockey à l’aréna, moi aussi, comme Benoît, je souhaite être dans une équipe. »  Svp que je les suppliais avec insistance ! Alors, mes parents m’ont fait comprendre qu’il était trop tard pour m’inscrire et que je devais patienter encore une grosse année. Imaginez, j’avais de la misère à attendre 2 semaines avant d’ouvrir mes cadeaux de Noël, comment ferais-je pendant 12 longs mois !?

Finalement, tout est allé très vite. Pas vu le temps passer. Faut dire qu’il n’était pas question que je reste assis sur mes lauriers et que je me pogne le beigne. J’avais un gros kick et y était pas question de laisser tomber cette passion pour une question de délai. Je venais d’entrer en religion et j’étais prêt pour mon chemin de croix. Un jour, j’aurais également ma place dans le temple municipal qu’était notre mini Forum à nous.

C’est alors que tout s’est enclenché. J’me suis mis à regarder assidument la Soirée du Hockey, à porter quasiment jour et nuit un superbe chandail de laine des Red Wings de Detroit, à me pratiquer dans le sous-sol avec une balle de tennis où j’ai, oh ! malheur ! démoli mon beau train électrique avec mes lancers frappés de débutant. Non, mais, quel cave que j’me suis dit des années plus tard ! Et finalement, à jouer seul dans la rue avec mon hockey à palette plate, mes 4 mottes de neige comme but et ma belle rondelle noire qui sentait bon le caoutchouc. C’est assez capoté, j’étais à la fois le commentateur, le joueur vedette, la foule, l’arbitre et le conducteur de Zamboni. Cibole, tout ça sans même avoir ingurgité une seule substance illicite. De l’imagination pure et simple ou un beau cas de psychiatrie, dirait un p’tit farceur ! En tout cas, c’était le temps béni où l’ennuyance ne faisait pas encore partie de ma vie.     

Mais, la cerise sur le sundae, c’est lorsque mon père nous a acheté un beau jeu de hockey sur table tout neuf. Croyez-moi, y était écœurant avec ses joueurs en 3 dimensions - aux couleurs des Bruins de Boston et des Black Hacks de Chicago - son tableau pour marquer les points, d’où on pouvait faire glisser la rondelle pour qu’elle soit mise au jeu, et sa fameuse coupe Stanley en miniature ! Les premières choses que je faisais en arrivant de l’école, c’était de garocher mon sac dans un coin, de me ramasser 2 Oreo avec un verre de lait et de descendre au sous-sol pour aller m’amuser avec mon jeu. Le bonheur que j’vous dis !

Pis là, enfin, arriva le moment tant attendu. L’inscription pour le hockey mineur. Je savais déjà patiner, mais je devais, à cause de mon âge j’imagine, débuter comme Novice. Qu’à cela ne tienne, j’étais prêt à apprendre tous les rudiments du sport, à perfectionner mon coup de patin et le contrôle de la rondelle. À ce niveau, il n’y avait pas de partie officielle, mais beaucoup de pratique et d’exercice pour nous préparer à devenir Atome. Mon choix se cristallisait à chaque fois que je sautais sur la glace. Superbe année qui s’est terminée avec une « vraie » partie où les gardiens n’étaient en fait que des joueurs qui voulaient tenter le coup et où nos entraîneurs faisaient office d’arbitre. Fallait nous voir aller, une bonne vingtaine sur la glace tout en motton - le comble de l’anarchie - courir comme des poules pas de tête après la rondelle pour essayer de la mettre dans l’net. C’était chic ! C’est quand même durant ce match que, dans l’euphorie la plus totale, je marquais mon premier but à vie et que je décidais finalement de devenir joueur avant.

C’est sûr que je pourrais continuer encore longtemps. On va dire comme on dit, ce ne sont  pas les anecdotes qui manquent. Par contre, l’idée ici ce n’est pas de vous ennuyer et de vous emmerder, mais de rendre votre lecture un brin agréable. Permettez-moi quand même d’y aller en rafale avec quelques souvenirs qui me sont revenus comme une vague l’année de mes 40 ans.    

À ce moment-là, j’me trouvais chanceux pas mal d’avoir eu la possibilité, que dis-je, la chance de jouer au hockey et de remporter des trophées et des médailles.

Je me suis souvenu du tournoi Atome de Louiseville qu’on avait gagné avec les Alouettes.

Je me suis souvenu de ma première paire de patin à lames noires. Des Delta 444 que je gardais dans les pieds en regardant le hockey. 

Je me suis souvenu de cette fin de semaine à St-Constant pour un match amical des équipes étoiles de nos villes respectives. On était monté en bus, sans les parents, et on couchait dans les familles qui nous recevaient.

Je me suis souvenu d’avoir fait soulever la foule au Tournoi Pee-Wee de Grand-Mère en faisant le 1er but de la soirée avec à peine 2 minutes de jouées dans la partie. C’était avec les Éperviers. J’avais fait 2 buts 1 passe dans notre victoire de 5 à 2. Même ma prof qui assistait au match en avait parlé en classe le lendemain !

Je me suis souvenu de cette participation au Tournoi internationale de Hockey Pee-Wee de Québec avec les Selects. Ça faisait au moins 20 ans qu’une équipe de Grand-Mère s’était présentée. On avait eu l’opportunité de voir jouer le frère de Wayne Gretzky et de le saluer par la suite.

Je me suis souvenu de la finale au Tournoi Pee-Wee de Grand-Mère, avec les Selects également. C’était bondé et on avait de la difficulté à respirer à cause de la fumée de cigarette. Oui, ça fumait à l’époque dans les arénas !

Je me suis souvenu et me souviendrai, pour toujours, de ma dernière saison avec les Dauphins dans la catégorie Bantam. Notre équipe avait terminé en première position, nous avions gagné le Tournoi de St-Georges de Champlain - j’avais reçu le trophée du joueur du tournoi - et nous avions remporté les séries éliminatoires de notre circuit.

Je me souviendrai à jamais de l’odeur des patates sauces, des hot dogs steamés, de la glace fraîchement faite, de l’ambiance enivrante des tournois et de ce moment inoubliable où l'entraîneur me donnait le signal d'aller, à mon tour, sur la glace.    

En terminant, j’aimerais ajouter que le hockey m’a sauvé de bien des écueils. Il m’a aidé à forger mon caractère, à passer au travers de bien des difficultés et à me sentir important durant cette période de la vie qui n’est pas toujours facile. Et ça, c’est grâce à mes généreux parents, à mes excellents entraîneurs, sans exceptions, et à mes talentueux coéquipiers.



Jean-Luc Jolivet

samedi 12 octobre 2013

JE SUIS MORT LE JOUR OÙ L’ON M’A TRANSFÉRÉ D’ÉCOLE 

(À tous les tits kids qui ne l’ont pas facile, mes hommages)


C’était pourtant une rentrée scolaire comme les autres. J’avais des papillons dans l’estomac et, comme de raison, de la difficulté à avaler le petit-déjeuner que ma mère m’avait préparé avec tendresse et amour.

Comme à chaque année, mes sentiments étaient contradictoires. Ils oscillaient entre le goût de prendre mes jambes à mon cou, de fuir dans ma cabane en bois pour y vivre à tout jamais et le désir de revoir mes camarades.    

J’étais beau et fier dans mon nouvel habit - hérité de mon frère aîné -, j’avais les cheveux courts, propres, les dents blanches et tous mes effets identifiés dans mon sac d’école tout neuf.

En sortant de la maison, je pris mon pas le plus assuré pour me rendre jusqu’au coin de la 9e rue et de la 15e avenue afin d’y attendre le bus. J’étais à la fois plein de confiance et un peu intimidé par les fiers à bras et le sourire discret que m’envoyait la petite nouvelle de la 16e avenue.

Le trajet se déroulait comme il se devait. C'est-à-dire dans la turbulence normale d’un bus remplis de ti-culs surexcités. Les taquineries, les claques à l’arrière de la tête, les bosses qui nous faisaient flipper, les odeurs de diesel et les cris du chauffeur étaient notre lot. Il n’y avait alors plus aucune échappatoire possible. Aussi vrai que l’automne succède à l’été, je devais, tout comme les autres, faire le deuil de ma liberté estivale pour me soumettre aux diktats du corps professoral.

La nervosité se faisait plus insistante lorsque la porte du bus s’ouvrit sur cette cour d’école vaste, poussiéreuse et bien clôturée. Heureusement, ma fidèle gang était dans un coin avec un ballon et j’accouru sans hésiter pour jouer avec eux. Bonne façon d’oublier un peu mon appréhension et le mauvais pressentiment qui me taraudait depuis le lever.

Au son de la cloche, on nous invitait à descendre dans le gymnase et à y attendre les instructions pour la suite des choses. Nous obéissions, tout en maugréant un peu de se faire bousculer de la sorte, tel un troupeau de moutons un peu bêta.

Là, les vraies affaires commençaient. J’allais enfin savoir si mes amis, et la petite nouvelle de la 16e avenue, seraient dans la même classe que moi.

Après les discours, les directives et les simagrées d’usages, le directeur, avec un ton solennel, nommait un professeur et se mettait à appeler les élèves à tour de rôle pour qu’ils se placent derrière ladite institutrice. Une fois la classe complétée, tout ce beau monde se dirigeait dans les locaux.

Tout allait rondement. Les classes de 3e et de 4e étaient tous rendues aux étages supérieurs, alors le stress augmentait. Roulement de tambours, voici le moment tant attendu, c’est le tour des 5e !

Ensuite, plus rien. Black out total. Tout s’est passé si vite que ma mémoire me fait défaut. Avais-je été à ce point lunatique et dissipé que je n’avais pas entendu le principal nommer mon nom ?  Tout ce dont je me souviens, c’est cette salle vide et silencieuse et ces 4 kids - dont j’étais - restés seuls et inquiets. Finalement, on nous amena dans le bureau du directeur où nous apprenions que désormais, pour nous, notre scolarité se ferait à l’école St-Louis-de-Gonzague. Après ce verdict froid et sans appel, on nous invitait à retourner à la maison.

Jamais de ma vie un chemin ne me paru aussi long et solitaire que ce 3 septembre 1979. Les yeux fixés sur le trottoir, je crois être revenu à la maison par instinct. Mon habit me semblait défraichit, mon sac pesait une tonne et mon estime venait de manger toute une raclée !

Cette journée n’était qu’un hors-d’œuvre, que le prélude, qu’une introduction aux 2 années d’enfer que j’allais passer dans ma nouvelle école. Je vous épargne les détails.

Ensuite, je n’ai jamais plus été le même.

Bien sûr, j’ai fait ma vie. Bien sûr, je suis encore debout. Bien sûr je suis un bon citoyen. Bien sûr, je gagne honorablement ma vie, n’empêche, je suis mort le jour où l’on m’a transféré d’école.



Jean-Luc Jolivet                 

samedi 5 octobre 2013

QUAND BIEN MÊME

Quand bien même je me vêtirais de modestie
Quand bien même je me nourrirais d’humilité
Quand bien même je ferais preuve de retenue

Je sais bien que je suis un humble orgueilleux
Je sais bien que je n’aime pas avoir l’air niaiseux
Je sais bien que je ne pense qu'à gagner

Quand bien même je serais bardé de diplômes
Quand bien même je serais constamment louangé
Quand bien même je ferais l’unanimité

Je sais bien que ce ne serait jamais assez
Je sais bien que la jalousie continuerait à m’empoisonner la vie    
Je sais bien que le doute continuerait à me hanter la nuit

Quand bien même je me souhaiterais unique
Quand bien même je me penserais le centre de l’univers  
Quand bien même je m’imaginerais sans défaut

Je sais bien qu’après moi ce ne sera pas le déluge
Je sais bien que je ne suis qu’un humain
Je sais bien que c’est déjà pas mal

SÉRÉNITÉ

Je trace patiemment chaque lettre du mot sérénité
                        gorgée de thé
Je respire librement chaque particule de lumière
                    moment de grâce
Je savoure lentement chaque bouffée de vie
                         satisfaction

Jean-Luc Jolivet