samedi 30 novembre 2019


LIBERTÉ D’ACTION


De toute ma vie, jamais n’ai-je été inquiété par des menaces sérieuses envers mon intégrité physique. Pas plus n’ai-je eu à entendre des propos dégradants et orduriers envers mon apparence, mes opinions ou ma façon de m’habiller.

J’ai toujours joui d’une très grande liberté d’action. Aussi bien dans mes paroles, mes choix de vie que dans mes mouvements.

Les seules vraies craintes que j’ai eues sont celles qui m’ont été imposées par mon imagination débridée et débordante. Par exemple, le jour où j’ai cru qu’un fou furieux était sur le point de m’attaquer lors de mon retour à pied à la maison après un programme double d’horreur présenté au cinéma le Charlot de ma ville natale. Pas mêlant, j’avais peur de mon ombre et du moindre coup de vent. J’étais certain qu’un maniaque était caché dans un des garages, entourés d’arbres sinistres, sur le coin de la 9e avenue et 8e rue. Prêt à me sauter dessus et à me tailler en pièces.

Faut dire que j’étais un ado récent et que j’étais certain qu’une bête hybride composée de Freddy, de Jason et du Loup-garou de Londres était soudainement attirée par la jeunesse Mauricienne afin de l’éradiquer de la surface de la terre.

Tout ça pour dire que je suis toujours en un seul morceau et que ces peurs que j’ai pu ressentir dans ma jeunesse ne m’ont jamais traumatisé au point de demeurer sur mes gardes pour le reste de me jours et de limiter mes déplacements.

Bien au contraire, je ne me suis jamais posé de question à savoir si je pouvais aller seul à tel ou tel endroit.

J’ai arpenté les rues de mon enfance ou celle de ma ville d’adoption à toutes les heures du jour ou de la nuit. Avec toutes mes facultés ou totalement aviné sans avoir la moindre appréhension.

Je n’ai jamais reçu de messages inquiétants pour mes prises de positions politiques ou pour mes lettres d’opinion publiées dans les médias écrits. Lorsque j’exprime ma colère, je ne passe pas pour un hystérique, mais bien pour quelqu’un ayant un sacré caractère. 

Me suis-je un jour demandé si mon habillement pouvait déclencher des remarques déplacées ou des regards lubriques ? Jamais.

Me suis-je déjà soucié de mon verre sans surveillance dans un bar ? M’est-il déjà venu à l’esprit que quelqu’un puisse ajouter du GHB dans celui-ci ? Pas une maudite seconde.

M’a-t-on, à un certain moment, signifié que je ne pouvais pas faire tel métier ? Niet.

M’a-t-on recommandé un jour de ne jamais voyager seul ? Pas du tout.

M’a-t-on dit que je ne pouvais pas faire tel sport, car ce n’était pas pour mon genre (la boxe ce n’est pas un sport pour les femmes dixit Michel Villeneuve) ? Non.

Lorsque j’ai commencé à fréquenter les filles, était-on inquiet pour ma sécurité et m’a-t-on subtilement dit de faire attention ? Négatif.

Voyez, je n’ai pas à me plaindre. Malgré toutes les responsabilités qui échoient à toutes et à tous et qui sont aussi mon lot, j’ai tout de même une grande liberté d’action.

Peut-on en dire autant pour tout le monde ? Assurément pas.

Cette semaine, en écoutant les témoignages des députées Christine Labrie, Méganne Perry-Mélançon, Paule Robitaille et Chantal Soucy lors du débat d’une motion sur la cyberintimidation faites aux femmes - elles ont également souligné que beaucoup d'hommes en sont aussi victimes - nous sommes en droit de nous demander si nous avons beaucoup progressé.

Lorsque les Journées d’action contre la violence faite aux femmes seront choses du passé, nous pourrons alors affirmer que c’est un pas dans la bonne direction.

Mais, d’ici-là, de toute évidence, il reste du travail à faire et du chemin à parcourir.

Jean-Luc Jolivet   

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